De la construction d'un synthétiseur

samedi 4 février 2012


Ces pages sont un journal de bord, et relatent la construction d'un clone de Synthi, synthétiseur mythique créé au début des années soixante-dix par la firme anglaise EMS.

Il y a quelques années, j'ai eu entre les mains, en vue d'une révision et réparation, un attaché-caisse Samsonite, avec à l'intérieur un synthétiseur matriciel du nom de "Synthi AKS". Son propriétaire, un ami, m'a laissé un temps plus que large à la réparation et à la découverte de l'engin.
N'étant pas clavier moi-même, j'ai toujours refoulé mes pulsions qui me commandaient l'acquisition de synthétiseurs, et j'ai exacerbé cette pseudo-passion avec des musicien·ne·s qui sauraient mieux que moi faire entrer des filtres en résonance tout en caressant le clavier. Mais là, j'avais entre les mains un instrument qui ne me montrait aucune hostilité, qui ne semblait pas me dire "nous ne sommes pas fait pour nous entendre, j'ai des touches et tu grattes des cordes..." Nous nous sommes vite apprivoisés et l'envie croissante de partager une partie de ma production sonore avec le Synthi est vite devenue irrépressible.

Un Synthi d'origine, suivant son état et son année de fabrication, se vend entre 10 et 18'000€ sur internet. Démesuré et hors propos...
Il s'agit d'une poignée de composants et d'un habillage relativement commun pour l'époque, qui ne justifie en aucun cas une telle dépense. Le Synthi prétendait être un instrument plus démocratisé que ses analogues d'autre firmes, et ne valait qu'une poignée de livres (420£ pour l'AKS à sa sortie en 1972). Ces pièces rares iront donc à des collectionneurs·euses, espérons que ces personnes aient le bon goût d'en jouer et d'en abuser...


Après mûre réflexion, j'ai décidé de reproduire les trois circuits de la machine, qui font le son singulier d'EMS, de leur flanquer une poignée de boutons, de mettre le tout dans une valise et de m'en aller moduler à travers champs...
Vite dit...

Les semi-conducteurs que l'on trouve dans ses entrailles, s'ils sont obsolètes et plutôt rares, n'en restent pas moins accessible, et c'est là tout ce qu'il faut pour reproduire le gros de l'ingénierie.
Évidemment, il faut ajouter à cela plusieurs dizaines de composants, parfois chers, et un temps qui dépasse l'entendement. Je ne quantifierai pas les heures passées en monnaie, et quant au matériel, ne nous voilons pas la face: il est bien connu que les pièces uniques ont un coût plus élevées que les grandes productions, et il est illusoire de s'imaginer s'en sortir avec quelques centaines d'euros.

A l'heure où j'écris ces lignes, je suis déjà au point de non-retour, puisque j'ai dans mon atelier ce chantre de l'électronique analogique... en pièces détachées. Ce qui suit raconte l'histoire de la construction du énième clone de Synthi.